Ce roman est une biographie, écrite par une fille à la mémoire de sa mère, écrite par une femme pour sa famille.
A la suite du suicide de sa mère, l’auteur décide d’écrire son histoire. Ce récit est dur, prenant et troublant. J’ai lié avec ce livre une relation très particulière. Il m’a tenu en haleine.
Lucile, héroïne du roman est le troisième d’une fratrie de neufs enfants. Une famille nombreuse et peu commune où il est difficile pour elle de se sentir à l’aise et d’y trouver sa place. Au sein de sa tribu, elle représente la mystérieuse, la discrète, la sauvage. Les années passent et les drames n’épargnent pas la famille Poirier. Ce qui accentue l’isolement de Lucile. Son passé traumatisant et sa vulnérabilité en feront une mère marginale. Lucile n’offre point à ses filles une vie traditionnelle ou disciplinée ; elles s’éduquent seules, indépendantes et vivent dans des conditions bien différentes de celles de leurs camarades de classe. Ce non-conformisme dans lequel l’auteur a été élevé, ne représente pas encore un malaise mais plutôt une forme de liberté et d’insouciance. Jusqu’au jour où Lucile passe de « l’autre coté ».
Sa disparité se transforma en totale folie, incontrôlable et inexplicable. Une folie accompagnée de bouffées délirantes, de violences verbales et physiques et de consommations interdites. C’est alors une triste valse de séjours en clinique, anesthésiants médicamenteux, tremblements et abrutissement qui emporte Lucile, son foyer et sa famille. Un spectacle effroyable et insoutenable.
Bien que la lecture de ces lignes me procurait angoisses et mauvais rêves, le roman de Delphine de Vigan m’a touché au plus profond de mon être. Comme si la douleur que ses enfants ont dû subir face à la maladie psychologique de leur mère était la mienne. Plusieurs interrogations me sont venues à l’esprit.
Une personne touchée par la démence et la dépression se rend-elle vraiment compte de son état et des dégâts qu’elle cause? N’est ce pas plutôt la tristesse et le chagrin qu’elle peut lire dans le regard de ses proches qui lui rappellent chaque jour le mal qu’elle leurs inflige ? La dépression est-elle une maladie héréditaire (La tante de Lucile possédait cette même fragilité) ou bien est-elle le résultat d’une enfance malheureuse ?
D’un avis purement personnel, je pense que la dépression est génétique. Pour moi, de la même manière qu’on naît avec des similitudes d’ordre physique ou de traits de caractère de nos ascendants, les maladies mentales et psychologiques peuvent faire partie de notre héritage génétique. Il faut comprendre ce que j’énonce ici. Si notre grand-mère, oncle ou cousin est dépressif, notre destinée n’en sera pas fatalement similaire. En revanche, il en résultera presque inévitablement une prédisposition à la dépression. Il me semble qu’il est alors du devoir de cette personne de se battre contre ce penchant face à l’adversité, de manière encore plus ardente qu’une personne lambda.
Pour moi, la dépression est une maladie et non un état. Certes, Lucile a eu à vivre des évènements effroyables et révoltants, mais pourquoi elle et pas ses autres huit frères et sœurs ? Pourquoi fut elle la seule à s’engouffrer dans cette terrible maladie ??
Le cocktail héritage génétique et fragilité face au malheur n’a pu épargner Lucile et l’a accompagnée jusqu’à la fin de son processus d’autodestruction : se donner la mort pour alors ne plus avoir à supporter la souffrance de sa vie.
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